La Bibliothèque Osler est en chantier depuis l’incendie de l’été. Comment abriter des collections ? Comment les protéger ? Que faire lorsque ça brûle tout autour? Le feu me poursuit et même aujourd’hui, après plusieurs mois, le lieu sent la fumée. Mirage de l’esprit et des sens qui vient coller un souvenir ancien sur le lieu où je suis. Parce que coller, c’est aussi plier le temps.
Dans la Bibliothèque Osler. Les livres n’y sont plus, le marbre des murs a été recouvert de contre-plaqué pour le protéger. Je porte des bottes de chantier et un casque de construction. Planchers et tapis sont recouverts de carton et de tape coloré. Murs en squelettes. Bâches blanches qui flottent ça et là, qui délimitent des zones, fragmentent les espaces d’avant. Parois molles qui respirent, grognent et grincent. Forêt d’acier qui cadre les trop vides bibliothèques de bois sombre. Lumière diffuse et neige duveteuse dehors. Paysages fantomatiques à l’intérieur. Fils et câbles des plafonds à nus et à vifs. Les nerfs du lieu sont à fleur de peau. Innervations, encore.
Les cendres de William Osler dans la bibliothèque vide. M me donne un livre sur la laparoscopie. À la toute fin du livre, une pochette de plastique contient une série de diapositives montrant des cavités et cavernes, des gorges profondes en feu et à vif. Comme des grands cris qui résonnent. Et c’est peut-être ceux d’Osler qui réclament le retour de ses livres.